Ma méthode des trois niveaux de communication- Vincent [Calldesk]
Ou comment révolutionner le monde du service client suite à un tour du monde 🌍
Ma méthode des trois niveaux de communication- Vincent [Calldesk]
Ou comment révolutionner le monde du service client suite à un tour du monde 🌍
Vincent Gire est un entrepreneur aguerri, co-fondateur de Calldesk et de deux autres startups, il nous partage à travers cet interview de très nombreux conseils et anecdotes.
🏠 Ville : Paris
🎂 Âge : 37
🏫 Études : Computer Science à Polytechnique & Stanford
⚙️ Outil favori : mon téléphone, pour prendre mes filles en photo
🔍 Ton entreprise : Calldesk
📅 Date de création : Mai 2016
🏦 CA (ou fourchette) : à 7 chiffres
👨👩👧👦 Nombres d’employés : 20
🤠 Jobs, Musk, Besos ou un autre ? Team Musk
💻 PC, Mac, Linux ou un(e) autre ? Mac sous Linux
🎒 Qui es tu ? Quel est ton parcours ?
Je m’appelle Vincent, j’ai 37 ans, et je suis entrepreneur depuis 15 ans.
J’ai fait mes études à Polytechnique en informatique, avant de partir aux États-Unis pour étudier la Computer Science à Stanford. En parallèle, j’ai profité de mon passage dans l’armée pour intégrer les régiments de commando de l’armée de l’air. Ça reste un bon souvenir : à 20 ans, j’avais effectué une trentaine de sauts en parachute et piloté un avion de chasse.
J’ai toujours été attiré par l’entrepreneuriat. Étant passionné de voile, j’ai monté ma première boîte alors que j’étais encore en école. La proposition était simple : numériser et diffuser les bulletins météo gratuits mis en place après la seconde guerre mondiale et émis sur les ondes courtes, pour offrir et diffuser à tous les bateaux de plaisance des bulletins météo gratuits.
C’était mon premier projet pour se faire la main, et rapidement, ça m’a démangé de recommencer. Avec un de mes meilleurs amis de promo, Rodolphe, on s’est associés et on a monté Wozaik en 2008, à l’époque des balbutiements de l’IA. Le but était d’aider les entreprises qui font de la pub sur Google à augmenter le ROI de leurs campagnes grâce à l’analyse sémantique des intentions de recherche. Autrement dit, en quelques millisecondes, nous étions capables d’associer la meilleure publicité à un internaute donné.
Après 5 ans et 2 pivots, nous avons revendu l’entreprise au groupe Solocal (ex-Pages Jaunes). Je suis resté un an chez Solocal, puis nous sommes partis réaliser un rêve de gosses avec ma femme Fanny : faire un tour de l’Atlantique en bateau. C’est à notre retour que j’ai décidé de lancer ma troisième entreprise : Calldesk.
💡Ta boite c’est quoi ? Comment est venue l’idée ?
C’est justement pendant notre tour du monde en bateau que j’ai découvert les pires aspects du service client. Fanny avait un problème de téléphone, et à chaque fois que nous captions du réseau, nous tentions de joindre son opérateur téléphonique pour régler le problème. Et à chaque fois, l’expérience était catastrophique : plus d’une dizaine de minutes d’attente, des interlocuteurs qui semblaient incapables de communiquer entre eux, il fallait ré-expliquer notre problème à chaque personne… Bref, un enfer : il nous a fallu plus d’un mois pour trouver une solution !
C’est à ce moment-là que je me suis demandé pourquoi c’était toujours aussi pénible d’appeler un service client. Je voyais ça comme un énorme gâchis, un décalage énorme entre la promesse initiale et l’expérience concrète. J’ai donc décidé de rentrer plus avant dans le monde des centres d’appel, ou plutôt des “centres de contact” comme on les appelle maintenant, car ils gèrent de nombreux canaux de contact différents.
J’ai constaté que le problème de la majorité des services clients, c’est qu’ils reçoivent beaucoup plus de requêtes qu’ils ne sont faits pour en absorber. Paradoxalement, près de la moitié de ces demandes sont très basiques : un mot de passe oublié, une demande de facture, la reprogrammation d’un rdv avec un technicien ou de la livraison d’un colis… Pour l’entreprise comme pour le téléconseiller, le traitement de ces demandes ne présente pas de valeur. Quant à l’appelant, son expérience pouvait clairement être améliorée !
J’ai donc utilisé mes connaissances en IA, qui dataient de l’époque Wozaik, pour créer un produit inédit : le Callbot, un agent virtuel capable de comprendre le problème d’un appelant par téléphone et d’y apporter une réponse en toute autonomie. Un peu comme un chatbot, mais disponible sur le canal voix, et capable d’aller beaucoup plus loin que Siri ou Alexa pour une problématique bien définie !
J’achevais la construction de mon MVP quand j’ai rencontré Aimé Dushimire, lui aussi serial entrepreneur, via le startup studio E-Founders. Le courant est tout de suite passé, et nous avons décidé de lancer calldesk en Mai 2016. Depuis, l’équipe s’est bien étoffée et nous sommes une vingtaine de personnes à travailler au quotidien pour créer la meilleure solution de callbot au monde !
📝 Un mot pour te décrire ? Un mot pour décrire la façon dont tu travailles ?
“Urgence”. Je pense que c’est un terme qui peut être très positif, parce que l’urgence pousse à l’action. En tant qu’entrepreneur, je ressens en permanence un sentiment d’urgence : tu identifies un problème sur le marché, tu veux être le premier à le résoudre différemment, tu veux faire mieux que les solutions existantes… Je trouve ça sain de considérer que quand tu lances ta boîte, tu es déjà en retard, et tu dois à tout prix innover pour t’en sortir.
Du coup, l’un des principes fondateurs de mon travail, c’est ce que j’appelle le “80–20” : 20% de tes efforts donnent 80% des résultats. L’urgence doit avant tout te pousser à prioriser ce sur quoi tu travailles, pour te concentrer sur ce qui compte. Mais attention, une fois que tu as choisi ce sur quoi tu veux travailler, la qualité doit être irréprochable : travailler vite ne veut pas dire travailler mal !
🧰 Quelles applications / outils te sont indispensables ?
C’est plus une méthode qu’un outil, tirée d’une discussion l’an dernier avec nos investisseurs qui m’a beaucoup marquée.
C’est la méthode des “trois niveaux de communication”, qui vise à épargner l’accumulation de “dette émotionnelle”. J’aime bien cet outil, car ça s’applique autant à l’entrepreneuriat qu’à plein d’autres sujets : l’amitié, l’amour, etc.
En gros, il existe trois niveaux de communication, du plus superficiel au plus profond. Le “niveau 1” concerne les discussions du quotidien, la légèreté. La plupart d’entre nous passons 95% du temps en niveau 1, il s’agit de toutes les discussions n’ayant aucune charge émotionnelle.
Mais parfois, on est tous obligés d’avoir des discussions moins agréables, et d’aborder les problèmes. C’est le “niveau 2”, qui se caractérise par des émotions négatives (colère, agacement, mépris, peur…). Ces discussions peuvent créer des fractures durables, avec tes collègues, tes employés, tes partenaires… C’est souvent elles qui créent de la “dette émotionnelle”, des frustrations ou des non-dits qui s’accumulent au fil du temps et qui peuvent finir par briser des relations (ruptures, démissions, etc.).
C’est pourquoi le “niveau 3” est vraiment nécessaire, et doit être encouragé pour sortir de l’ornière. Il s’agit du niveau de communication le plus engageant, où chacun est invité à exprimer ce qu’il ressent au fond de lui, et à réussir à exprimer aux autres son ressenti et ses sentiments. Évidemment, ça implique de s’exposer, ce qui n’est pas forcément facile au début ; mais c’est vraiment une approche qui vaut le coup d’être travaillée à long terme !
🔥 Les tips actionnables / best practices que tu peux partager ?
Avec Calldesk, on évolue dans le monde du service client, où je me suis rendu compte que toutes les expériences peuvent être décomposées en 3 parties : il y a l’attendu, l’espéré, et l’inattendu. Dans tout contact avec une entreprise, il y a ce que tu attends, ce que tu espères, et il y a encore un niveau d’après. Sur les sujets importants, je recommande vraiment de consacrer un peu plus de temps au fait de chercher comment aller plus loin que ce à quoi s’attend la personne en face : en lui offrant une expérience à laquelle elle ne se serait même pas attendue, tu vas durablement la marquer, et atteindre à long terme des résultats bien supérieurs.
🤓 Quel est le meilleur conseil qu’on t’ait donné et que tu puisses donner ?
Toujours se forcer à prendre du temps quand tu communiques sur des choses importantes. Et c’est pas facile à faire au quotidien quand tu as en permanence le sentiment d’urgence dont je te parlais… Mais par exemple, attendre un jour ou deux pour répondre à un partenaire important, ça t’aide à mûrir le sujet et à garder la tête froide, même si les enjeux sont importants.
🎱 Baguette magique ! Tu reviens en arrière tu changes quoi ?
Je peux plutôt utiliser la baguette pour le futur ? Je trouve qu’on a trop tendance à vouloir réécrire le passé, moi le premier. Donc je préfère regarder vers l’avant !
⚖️ Balance perso / pro : comment tu équilibres ?
J’ai toujours considéré que j’étais une machine de productivité et que mon temps était parfaitement optimisé… Et puis, il y a 4 ans, j’ai eu une petite fille. Et elle a eu une petite sœur l’année dernière ! Je pense que tous les parents le savent : les enfants t’obligent à déployer des trésors d’ingéniosité pour concilier vie pro et vie perso.
De mon côté, j’ai envie d’être présent pour elles au quotidien, donc je m’astreins au respect d’horaires clairement définis. Ça m’oblige à être productif la journée !
🍀 La boîte qui t’inspire le plus ? Pourquoi ?
Je pense que le travail de tous les entrepreneurs est inspirant, qu’il s’agisse d’un Elon Musk comme du patron du café du coin. En ce moment et vu l’actualité, j’ai d’autant plus de respect pour le second !
📚 Quels livres, podcasts, personnes (etc) t’ont le plus influencé ? Quels blogs ou sources d’infos suis-tu ?
Un livre qu’Aimé et moi avons fait lire à toutes les recrues de calldesk : “Delivering Happiness: A Path to Profits, Passion, and Purpose”, de Tony Hsieh, l’ancien fondateur et dirigeant de Zappos, qui nous a quittés dans des circonstances dramatiques il y a quelques semaines.
La manière dont il a construit Zappos, leur branding, leur culture, leur marque employeur, en décidant d’offrir un service client inoubliable comme marque de fabrique… Le livre se lit très facilement, c’est aussi une forme d’autobiographie qui explique comment il a revendu une de ses premières boîtes pour 200 M$ à moins de 25 ans… Et ce qui l’a poussé malgré tout à revenir à l’entrepreneuriat, et à risquer de tout perdre avec son nouveau projet. Une véritable source d’information, tant au niveau personnel que business.
⭐ Un flop qui devient top : Comment as tu transformé une situation difficile en succès ?
Pendant mon tour de l’Atlantique en bateau, nous nous sommes retrouvés à court de provisions et sans possibilité de retirer de l’argent pendant trois semaines, condamnés à manger des pâtes et du riz… Nous nous sommes mis à la pêche, grande première pour nous, et sur un coup de chance, nous avons attrapé une belle dorade coryphène de 12kg. Après l’avoir mangée grillée, en brandade, à l’eau… nous avons commencé à troquer des filets contre d’autres provisions. Compte tenu de la taille de l’animal, notre petit commerce a eu un très grand succès et nous avons rapidement reconstitué des provisions bien diversifiées ! Sans compter les nombreuses invitations à prendre l’apéro qui sont nées de ces trocs improvisés ;-)